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Trois points d’attention après les élections américaines

Fragilité structurelle du dollar, diversification dans les métaux précieux, équilibre de la poche actions des portefeuilles: nos conseils dans le contexte d’incertitude qui prévaut à l’issue de l’élection présidentielle américaine.

Un dollar sous pression

Devise de réserve mondiale, le dollar reste recherché lors des périodes d’instabilité des marchés. Il présente néanmoins plusieurs points de vulnérabilité. L’assertion, il y a cinquante ans, de John Connally, le secrétaire d’État au Trésor de Richard Nixon, selon laquelle le dollar est la monnaie des Américains, mais notre problème n’a pas pris une ride. La dépréciation structurelle du billet vert reste une sérieuse préoccupation pour un investisseur en franc suisse. Quelle que soit l’issue des élections présidentielles américaines, rien ne laisse augurer un changement de tendance sur ce front.

La dégradation toujours plus importante des comptes publics américains devrait continuer de peser sur le dollar. Mises à rude épreuve par la crise du COVID-19, ainsi que par plus de deux décennies de déficit malgré un long cycle de croissance, les finances de l’État fédéral ne sont pas aux mieux (voir le graphique ci-dessous). Elles devraient clore l’exercice 2020 sur un découvert proche de 15%, selon le Bureau du budget du Congrès (CBO), ce qui portera sous peu l’endettement des États-Unis au-delà des 100% du PIB.

La nécessité de nouvelles mesures de stimulus et d’un vaste plan de modernisation des infrastructures est admise tant du côté démocrate que républicain. Ces efforts coûteront des milliers de milliards de dollars, qui ne pourront être que partiellement autofinancés, ce qui va considérablement aggraver les déséquilibres financiers des États-Unis. Selon le CBO, le déficit budgétaire fédéral atteindra a minima quelque 9% du PIB l'an prochain et restera supérieur à la moyenne de long terme de 3% chaque année jusqu'en 2030. De son côté, la dette pourrait bondir jusqu'à 150% du PIB dans dix ans, selon certaines prévisions.

Pour supporter le poids croissant de son endettement et honorer la charge des intérêts liés à celle-ci, les États-Unis ont durablement besoin de taux bas. L’État fédéral peut compter sur la Réserve fédérale américaine (Fed) pour maintenir les taux courts au plancher. Ce faisant, néanmoins, le différentiel de rendement entre le dollar et les autres monnaies s’est considérablement contracté, alors que la devise américaine avait toujours bénéficié d’une rémunération plus attractive que ses pairs. La disparition de cet avantage comparatif continuera de rendre le billet vert moins intéressant.

Le volume de la dette qui sera émise pour implémenter le programme du prochain président, notamment pour financer son ambitieux projet de rénovation des infrastructures, ne pourra par ailleurs pas être absorbé sans le concours de la Fed. Selon une récente étude du FMI, la Fed a déjà acquis depuis février dernier près de 60% des nouvelles émissions de l’État américain, un activisme qui se reflète dans la trajectoire ascensionnelle de son bilan. La monétisation de la dette publique devra continuer de tourner à plein régime afin de faire face aux nouveaux besoins de financement des États-Unis. Pour acquérir les nouveaux emprunts émis par le Trésor, la Fed va donc créer de la nouvelle monnaie en quantité, ce qui aura encore un important effet dilutif sur le dollar.

Malgré son statut de monnaie de réserve, le billet vert présente donc plusieurs points de fragilité. Les investisseurs qui évaluent leurs avoirs et planifient leurs dépenses à long terme dans notre monnaie nationale devraient s’interroger systématiquement sur l’opportunité de couvrir leurs placements en dollar, dans le sillage de tout rebond de la devise américaine. La bonne nouvelle est que le coût d’une telle protection n’a jamais été aussi bas. S’il avoisinait encore 2% à 3% ces dernières années, il est tombé aujourd’hui à quelque 1% par an. Pour profiter de cette opportunité, n’hésitez pas à vous renseigner auprès de votre conseiller.

L’or, plus précieux que jamais

Pour protéger son patrimoine de dérives potentielles d’un endettement croissant et d’une création monétaire débridée, nous ne saurions que réitérer notre conseil d’intégrer, à titre de diversification, des métaux précieux dans les portefeuilles. L’or, par exemple, constitue une protection particulièrement appropriée contre la dépréciation des monnaies papier. Le métal jaune, dont l’offre est limitée - les stocks d’or extraits tiendraient dans trois ou quatre piscines olympiques - et dont les attributs de monnaie d’échange sont encore dans les mémoires, devrait continuer de bénéficier de sa rareté.

L’or constitue également une digue contre la dévaluation du dollar. Son cours, libellé dans la devise américaine, bénéficie en effet généralement des mouvements de faiblesse du billet vert. Le métal précieux profite par ailleurs de la chute des taux réels - soit les taux retranchés de l’inflation - auxquels il est inversement corrélé. Ceux-ci sont aujourd’hui solidement ancrés en territoire négatif (voir le graphique ci-dessous). Dans un environnement où les rendements des emprunts sans risque restent au plancher, l’absence de rémunération de l’or ne constitue dès lors plus un frein à la demande des investisseurs.

Enfin, l’or, qui joue le rôle d’assurance de dernier recours dans un portefeuille diversifié, offre une couverture idéale en cas de dégradation inattendue du scénario économique, d’une nouvelle détérioration sur le front sanitaire ou en cas d’incertitude géopolitique majeure.

L’investisseur en franc suisse qui souhaite s’exposer au métal précieux devrait prendre soin de couvrir l’exposition au dollar de la position ou de choisir des produits qui incluent directement cette couverture. Il doit aussi absolument veiller à faire appel à des véhicules de placement qui garantissent la contrepartie physique de l’or!

Anticiper une progressive normalisation

Autre recommandation à observer à ce stade: la bonne diversification de la poche actions des portefeuilles. Nous conseillons en particulier d’établir un bon équilibre entre les titres de croissance, au premier rang desquels on trouve les sociétés technologiques américaines, et le reste de la cote. Contrairement à la crise financière de 2008, l’épreuve sanitaire n’a pas renversé, mais accéléré, les tendances de fond à l’œuvre depuis plusieurs années. Le changement des habitudes de consommation et la généralisation du travail à distance induits par les confinements ont renforcé le statut des sociétés capables d’offrir de nouveaux produits ou services dans les domaines de la digitalisation, de la cybersécurité, du stockage de données, des objets connectés, de l’intelligence artificielle, de l’automatisation ou du commerce en ligne. Ces sociétés doivent trouver dans les portefeuilles une place qui reflète fidèlement leur poids croissant dans l’économie et leur contribution toujours plus élevée aux bénéfices des marchés des actions.

Néanmoins, les titres de substance ne devraient pas être négligés, car c’est vers les sociétés les plus affectées par la crise sanitaire que vont se diriger les masses de capitaux mobilisés par les États, notamment les efforts de relance du prochain président américain. Cette manne profitera notamment à des secteurs comme l’industrie, les services à la collectivité et à certains pans de l’énergie.

Par ailleurs, le coronavirus ne sonne pas la fin de l’Histoire. Les gens retrouveront tôt ou tard des envies de mobilité et l’appétit pour les interactions humaines. Chaque jour qui passe nous rapproche de la découverte d’un vaccin. Une sortie par le haut sur le front sanitaire pourrait provoquer une rotation sectorielle sans précédent qu’il est vain d’espérer attraper au vol. Il convient dès lors de l’anticiper (voir le graphique ci-dessous). Elle bénéficiera en premier lieu aux secteurs de substance aujourd’hui les plus décotés.