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Le poids du nouvel ordre commercial mondial

  • L’imposition de barrières douanières élevées aux États-Unis influe sur l’activité.
  • Le risque de récession ne peut plus être écarté.
  • Les marchés des actions et des obligatations doivent compter avec le retour de la volatilité.

Le Jour de la libération est arrivé. Et avec lui une tempête commerciale, économique, financière et, bien sûr, politique. Le 2 avril, Donald Trump imposait des droits de douane dits réciproques – comprenant donc la notion de négociation – au monde entier. Des taxations à taux variables d’un pays à l’autre, mais qui s’ajoutent à un plancher universel incompressible de 10% à tout produit entrant aux États-Unis. Washington revoit son rôle de garant de la sécurité mondiale et exige des compensations économiques et financières. Le chapitre, qui s’était symboliquement ouvert avec l’entrée de la Chine à l’OMC en 2001, se referme. Même si les négociations aboutissent avec les principaux partenaires commerciaux, un retour au monde d’avant paraît illusoire.

Contre-pouvoir des marchés

L’administration Trump vise, avec cette rupture de l’ordre commercial mondial, non seulement le rapatriement d’emplois manufacturiers aux États-Unis, mais aussi des rentrées fiscales capables de réduire l’endettement de la première économie mondiale. Une situation qui explique en partie le revirement du président le 9 avril: il accordait alors à ses partenaires – Chine exceptée – un délai de 90 jours avant l’entrée en vigueur effective des droits de douane. Longtemps désignés comme le principal contre-pouvoir à la Maison Blanche, les marchés ont joué leur rôle. Le recul des indices, la chute du dollar et surtout le bond des taux longs ont fait pression alors que les États-Unis doivent renouveler les échéances de la moitié de leur dette dans les trois ans. La présidence doit en effet replacer, si possible à long terme et à moindres coûts, près de USD 25 000 milliards.

Scénario du pire

La phase de négociation en cours ne se traduit pas par une détente sur tous les fronts. Les tensions avec la Chine se sont accrues comme le démontre l’escalade des droits de douane imposés de part et d’autre – 145% pour l’entrée des produits chinois en Amérique et 125% pour les importations américaines à Pékin – sur fond de bataille pour le leadership technologique. Le scénario du pire passe par la dégénérescence de ces tensions en guerre des changes et par l’échec des négociations commerciales avec les grands marchés des États-Unis, que ce soit en Europe ou en Asie.

Le monde n’est cependant pas à l’abri d’une meilleure issue. Donald Trump connaît les règles du jeu. Il sait manier signaux, images et verbes pour montrer la voie, même si elle va en sens inverse de celle indiquée précédemment. Ce peut être vrai pour les négociations commerciales comme pour la gestion du déficit budgétaire.

Croissance affectée

Si l’on peut supposer que les droits de douane qui entreront en vigueur à fin juin seront inférieurs à ceux annoncés début avril, ils ne seront cependant pas exempts de conséquences sur l’économie et les marchés. Le tournant protectionniste s’ajoute au ralentissement attendu de l’activité dans le monde. Les barrières tarifaires rendent, en outre, la maîtrise de l’inflation plus incertaine. Le Fonds monétaire international (FMI) a déjà revu à la baisse ses prévisions économiques. La croissance mondiale devrait s’afficher à 2,8% contre 3,3% prévu précédemment.

Ambiance incertaine

Notre scénario n’écarte plus le risque de récession. Mais, au gré des décisions de Washington, notre scénario ne peut écarter non plus un atterrissage en douceur comme attendu en début d’année encore. Une nouvelle réalité qui doit se refléter dans la gestion des portefeuilles, quitte à paraître dichotomique. Nous avons réduit notre exposition aux actions, notamment américaines, et avons donné une orientation plus défensive à cette classe d’actifs. La volatilité devrait s’étendre aux marchés obligataires. Si l’or poursuit sur sa tendance ascendante, l’immobilier indirect suisse devrait pouvoir compter sur ses bases solides malgré des valorisations élevées.

La stratégie d’investissement en 3 questions

Un bon dosage de prudence et de diversification

1. Comment se positionner en actions dans cette ambiance volatile?

Si l’environnement était encore favorable aux actions en début d’année, l’heure est désormais à la prudence et à une nécessaire diversification géographique. Des rebonds techniques sont bien sûr prévisibles à court terme. À plus longue échéance, cependant, tout dépendra des retombées économiques de la guerre commerciale sur la croissance, l’inflation et les perspectives bénéficiaires des sociétés, notamment américaines. Dans ce contexte incertain, nous sous-pondérons les actions dans les portefeuilles, et plus particulièrement les actions américaines. L’Europe a retrouvé des couleurs, notamment en raison de valorisations et de perspectives bénéficiaires plus favorables qu’elles ne le sont outre-Atlantique. Le marché suisse peut compter sur ses caractéristiques défensives pour attirer les investisseurs et les investisseuses. Il présente par ailleurs des valorisations inférieures à sa moyenne de long terme. La prudence reste également de mise dans l’approche sectorielle. En Suisse, nous surpondérons la santé aux fondamentaux solides et présentant une croissance des bénéfices supérieure à la moyenne. Les valeurs suisses et européennes restent ainsi proches de l’indice de référence dans les portefeuilles. Il est également intéressant de relever le retour des indices émergents, portés par la technologie chinoise et la baisse du dollar.

2. Quel rôle pour les obligations en francs?

À l’annonce du Jour de la libération américaine, les obligations en francs ont pleinement joué leur rôle de valeurs de refuge. Les emprunts de la Confédération ont séduit contrairement au marché obligataire américain qui n’a pas trouvé grâce aux yeux des investisseurs et des investisseuses. Cependant, les perspectives ne sont guère brillantes. L’appréciation du franc pourrait contraindre la BNS à revenir à un taux d’intervention négatif. Dans cet environnement de rendements faibles, le positionnement dans les actifs à revenu fixe dépend de son profil d’investissement. Il peut aller d’une diversification au sein de la classe d’actifs, notamment vers les titres à haut rendement, à des positions dans l’or, pour renforcer la gestion des risques, et l’immobilier indirect pour optimiser la génération de rendement.

3. Quelles perspectives pour le dollar?

On pourrait résumer la situation ainsi: le roi est nu. La chute du billet vert reflète l’érosion de la confiance des marchés envers les États-Unis. Un phénomène nouveau vient ainsi de se produire et devrait résonner comme un avertissement pour Washington. Ce recul signale l’amorce d’une crise de confiance envers les actifs en dollars, notamment envers les bons du Trésor, contrairement à ce qui se passe habituellement en période de tensions. Le meilleur baromètre de cette confiance est la paire USD/CHF. En baisse de plus de 10% depuis le début de l’année, le dollar a atteint son niveau le plus faible contre le franc depuis la fin du taux plancher en 2015. Un rebond, même partiel, viendrait signaler un retour de la confiance des marchés.